Le Réseau européen de concurrence (REC) publie un document conjoint des dirigeants des autorités nationales de concurrence (ANC) de l'Union européenne sur la proposition de Digital Markets Act (DMA). Ce document conjoint porte particulièrement sur l’articulation nécessaire entre la mise en œuvre du DMA et celle du droit de la concurrence et formule des propositions visant à renforcer l'efficacité de ce nouvel outil en permettant aux ANC d'appliquer les procédures liées au respect du DMA. Le document conjoint se concentre sur les aspects institutionnels qui ne sont pas, à ce stade, présents dans la proposition, afin de rendre le DMA aussi efficace et pérenne que possible.
Le document conjoint du REC identifie la forte nécessité d'une meilleure coordination de l'application du DMA avec les procédures relatives au droit de la concurrence. Le DMA devrait intégrer un mécanisme de coordination spécifique, basé sur les principes existants du règlement 1/2003 et les procédures déjà en place au sein du REC. Cette coordination permettrait de s’assurer que les procédures du DMA et les enquêtes de concurrence, ou les opérations de concentration concernant les « gatekeepers » (« contrôleurs d’accès »), menées en parallèle puissent se dérouler sans heurts ni entraves procédurales, tout en permettant la meilleure allocation des ressources possible. Le document conjoint suggère que l'efficacité du DMA gagnerait à permettre aux ANC, sur une base volontaire, d'aider la Commission européenne à faire appliquer le DMA (par exemple, en recevant des plaintes, en contribuant à des opérations de visite et saisie si nécessaire ou en collectant des informations) ou d'appliquer elles-mêmes le DMA lorsque cela est approprié, et en étroite coordination avec la Commission européenne. Le DMA bénéficierait ainsi de l'expérience d'experts hautement qualifiés à travers l'Europe et tirerait pleinement parti des effets de réseau qui caractérisent le REC.
Les membres du REC se félicitent du Digital Markets Act qui, s'appuyant sur la pratique décisionnelle ainsi que sur les travaux menés par la DG COMP et les autorités nationales de concurrence au cours des vingt dernières années, constituera un outil supplémentaire puissant pour lutter efficacement contre certains des comportements les plus nocifs mis en œuvre par des « gatekeepers » très importants.
La complémentarité entre le droit de la concurrence et le DMA, qui a été une source d’inspiration pour l'élaboration du DMA, sera également un principe directeur pour l’avenir. Le droit de la concurrence restera en première ligne pour assurer des marchés numériques ouverts et équitables, mais il contribuera également à rendre le DMA adaptable, en identifiant par exemple, de nouvelles pratiques abusives qui permettront, le cas échéant, de mettre à jour des obligations énumérées dans le DMA.
Compte tenu de l'importance des enjeux, une application effective du DMA dès son adoption est cruciale. Pour atteindre cet objectif fondamental, l'application du DMA gagnerait considérablement à utiliser pleinement le savoir-faire et les ressources des autorités nationales de concurrence, qui ont accumulé le plus haut niveau d'expertise au sein de l'économie numérique en matière de pratiques des plateformes numériques qui nuisent à une concurrence loyale et ouverte dans leurs écosystèmes respectifs.
Sur le fondement de l'expérience du REC, le document conjoint propose une vision concrète de la contribution que les ANC pourraient apporter à l’efficacité du DMA.
Bien que le centre de gravité du DMA devrait demeurer au niveau européen, dès lors que la Commission européenne serait seule compétente pour mettre en œuvre certains des pouvoirs décrits dans le DMA (comme celui de désigner des « gatekeepers » ou de mettre à jour la liste des obligations), les pouvoirs d’exécution pourraient être partagés, sous la supervision de la DG COMP, avec les autorités nationales de concurrence, dans les cas appropriés. La participation des ANC se ferait naturellement en étroite coordination avec la Commission, et avec l'accord de l'ANC concernée.
Dans ce contexte, le mécanisme de coopération mis en place par le REC au cours des vingt dernières années devrait servir de modèle afin d'assurer une application cohérente du DMA ainsi qu’une bonne articulation avec le droit de la concurrence.